Date: 12 septembre, 2019 - Blog
Variations sur le thème de l’aléa moral
Il existe un aléa moral lorsqu’une partie à une transaction est incitée à prendre des risques commerciaux inhabituels, car il est peu probable qu’il en subisse les conséquences potentielles.
Source : Investopedia
À la fin des années 2000, la récession a mis en lumière les comportements à risque de sociétés américaines telles que Bear Stearns, AIG, Chrysler et General Motors. Leurs stratégies ineptes, leur endettement excessif et leurs manœuvres comptables ont fini par mettre en péril leurs milliards de dollars à contributions de l’économie, ainsi que des milliers d’emplois. L’argent des contribuables américains a été injecté pour sauver ces entreprises considérées comme trop grosses pour faire faillite. Les hauts dirigeants de ces entreprises ont en réalité été sauvés par des fonds publics.
En Europe, le culte de l’austérité et le traité de Maastricht ne laissent, en principe, aucune place à l’aléa moral. En pratique, le sauvetage de la Grèce et les multiples activités d’ingénierie financière de la BCE ont permis une version confidentielle / officieuse de celui-ci. Les banques italiennes et espagnoles ont pratiquement bénéficié d’un soutien vital ces dernières années via des financements publics – parfois indirects. Les banques allemandes, sinon les constructeurs automobiles, viendront ensuite.
Le Royaume-Uni et l’Irlande sont également intervenus pour renflouer leurs grandes banques. Quelques décennies auparavant, le Japon l’avait également fait avec les assureurs-vie, qui risquaient la faillite en raison de leurs trop grand engagements fixes envers leurs assurés. Le gouvernement a rompu les contrats privés et modifié leurs conditions…
L’aléa moral est également au cœur du système bancaire chinois
Les décideurs politiques détestent renflouer les banques, mais le font depuis des années. Bank of Jinzhou, un petit prêteur du nord, est l’un des derniers exemples d’une telle opération en août dernier. Auparavant, le marché monétaire avait paniqué en juin passé, lorsque la Baoshang Bank (Ineer Mongolia) avait été reprise par les autorités, mais sans que tout son passif ne soit couvert. En effet, alors que tous les dépôts des clients privés étaient pleinement garantis, les sociétés et les créanciers interbancaires avec des dépôts de plus de 50 millions de Rmb (7,2 millions de dollars US) n’avaient été payés qu’à hauteur de 70 à 90% … Cette tentative louable de discipline du système bancaire aurait pu créer une panique massive lors de la première prise de contrôle bancaire par les autorités depuis le début des années 2000. En fin de compte, la banque a réussi à boucler son refinancement à court terme au moyen de certificats de dépôt négociables. Le marché du crédit intérieur s’est rapidement calmé.
Différentiel entre NCD et obligations du gouvernement à 3 mois
Source : Grizzle
L’affaire Baoshang confirme la volonté du gouvernement de progresser dans son long processus de réforme structurelle, c’est-à-dire dans sa lutte contre l’aléa moral. C’est surprenant (courageux ?) dans le contexte de la difficile réduction forcée du désendettement du secteur bancaire parallèle. Les autorités compétentes semblent en effet déterminées à réduire les risques dans le secteur financier, quel que soit le prix / coût.
- Le soutien politique de haut niveau confirme la volonté de s’engager dans des réformes structurelles, malgré le ralentissement de la croissance
- La Chine joue un redux symbolique de la « longue marche » (retraite militaire entreprise par l’armée rouge en octobre 1934 – 1935)
- Nous ne devrions ni nous attendre à un assouplissement budgétaire majeur (à la 2016), ni à un assouplissement quantitatif à court terme. L’économie et les marchés vont probablement évoluer latéralement
- Mais tout pourrait changer au premier semestre 2020, au moment même où l’économie américaine et son président seront confrontés à des échéances critiques…