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Date: 14 juin, 2022 - Blog

La métamorphose de l’inflation

La pandémie a profondément perturbé les économies au cours des deux dernières années. Et ce n’est pas fini, à en juger par les difficultés de la Chine à s’extraire de sa politique du Zéro Covid, qui continue de provoquer des blocages et donc des interruptions des chaînes de production / des encombrements de fret dans les ports chinois. Deux chocs exogènes, les perturbations dans la production de biens de consommation et la flambée des prix des matières premières – exacerbée par la guerre en Ukraine – alimentent la hausse des coûts des entreprises.  Ne leur en déplaise, cette inflation des coûts n’est pas un facteur que les banques centrales peuvent contrôler. En revanche, elle les inquiète, car elle favorise le rattrapage salarial. Et l’on sait le rejet que les grands argentiers on pour l’installation d’une spirale prix-salaires, incontrôlable par le passé.

Jusqu’à récemment, cette inflation se logeait principalement dans le segment des biens. Elle va lentement s’estomper car les ménages commencent à perdre confiance et achètent progressivement moins. Ils ont beaucoup acheté pendant la pandémie et sont quasiment « saturés ». Avec la réouverture des économies, ils orientent désormais leurs dépenses vers les services. Les voyages, les sorties au restaurant, les loisirs, etc. En effet, l’inflation des services américains – hors énergie – est passée de 4,2% à 4,7% entre février et mars.

L’inflation des services américains décolle

Les services prendront progressivement le relais de l’inflation des biens

Les premiers représentent une part plus importante de l’indice des prix des pays développés

Une méchante accélération de l’inflation dans la zone euro

L’inflation s’installe par le biais des prix de l’énergie et des denrées alimentaires importées. Le problème supplémentaire du vieux continent vient de la faiblesse de l’Euro, dont les vecteurs sont multiples et complexes. En particulier, la proximité de l’Ukraine et donc le risque géopolitique, la grande dépendance aux exportations énergétiques russes, et les atermoiements de la BCE.

L’inflation en Europe rattrape celle des États-Unis

L’inflation des services décolle également en Europe (3,3% en avril contre 2,7% en mars).

Vers une embellie grâce au réassortiment / restockage ?

Les consommateurs ont acheté des biens « comme des fous » pendant la pandémie, poussant les stocks à un niveau très bas par rapport à la tendance à long terme. Malgré les blocages et contrairement à un large consensus des économistes, il n’a pas fallu longtemps pour que les stocks se reconstituent dans la foulée. Avec le double impact, ces derniers mois, de la réorientation des consommateurs vers les services et de la détérioration du pouvoir d’achat (due à l’inflation rapide), les stocks se sont envolés ces derniers temps.

L’impact de stocks beaucoup plus élevés est déjà apparu avec les données calamiteuses des détaillants américains au premier trimestre. Cela remet clairement en question leur capacité à défendre leurs marges futures. Bien que l’on ne s’y attendait pas vraiment, la période des soldes d’été pourrait être très intéressante/fructueuse pour les consommateurs.

La décélération de l’inflation des biens s’intensifiera

En raison de la distorsion des effets de base, il ne faut plus considérer les chiffres de l’inflation en glissement annuel, mais se concentrer sur les chiffres en glissement mensuel

  • Sans fard, l’inflation montre son vrai visage : tenace. Les irritations qu’elle provoque pourraient être de longue durée
  • L’inflation a probablement atteint son sommet aux États-Unis et est sur le point de l’atteindre en Europe. Elle devrait s’accélérer au Japon et en Chine
  • Un retour de l’inflation dans la zone de confort des banques centrales (disons autour de 3% pour l’IPC de base) ne se produira pas au cours des prochains trimestres, sauf en cas de récession grave