Date: 23 juin, 2022 - Blog
Fragmentation européenne
La BNS a pris les devants en relevant de manière surprenante ses taux de 50pbs pour contrer les pressions inflationnistes qui ont atteint leur plus haut niveau depuis 2008 à 2,9%. Après des années de lutte contre la déflation, l’inflation est désormais trop élevée et la BNS a décidé d’agir rapidement. Cette volte-face s’explique aussi par un changement d’état d’esprit. Après avoir été considéré comme cher pendant des années, le CHF n’est plus considéré comme survalorisé. En augmentant ses taux avant la BCE, la BNS indique qu’un CHF plus fort n’est plus un problème. Cela est possible parce qu’un CHF fort a permis à l’inflation d’être plus modérée qu’en Europe.
En outre, le président Jordan a indiqué que la BNS reste prête à intervenir sur le marché des changes, dans les deux sens : soit en achetant des devises comme elle le fait depuis des années, soit en vendant si l’affaiblissement du CHF est trop important. Au cours de la dernière décennie, la banque centrale a accumulé 800 milliards de CHF de réserves de change. Le spectre de la vente par la BNS d’une partie de ses réserves, et donc de ses obligations étrangères, se profile. Elle se compose de 37% d’EUR et 39% d’USD. Compte tenu du stress actuel, les emprunts d’Etat en euros devraient être les plus impactés. L’échéance moyenne des avoirs obligataires de la BNS est inférieure à 5 ans. La plupart des détentions étrangères (96%) sont notées de AAA à A. Cependant, ce montant de moins de 300 milliards d’obligations d’État européennes ne représente qu’une fraction du marché. A titre de comparaison, la taille du bilan de la BCE approche les 9’000 milliards.
Au contraire, malgré que la BCE ait tenu une réunion d’urgence seulement 6 jours après sa réunion ordinaire en réponse à la hausse des taux obligataires italiens, elle n’a pas agi. Le résultat de la réunion a été un engagement à utiliser la flexibilité des réinvestissements du programme d’achats d’urgence en cas de pandémie comme un outil anti-fragmentation. L’idée devrait être de réinvestir les montants des obligations allemandes arrivant à échéance dans des obligations italiennes.
La volatilité restera jusqu’à ce que la BCE intervienne réellement. L’outil anti-fragmentation devrait être dévoilé lors de la prochaine réunion du 21 juillet. Les taux italiens anticipent déjà bien les risques et la BCE dispose d’une marge de manœuvre importante.
Pire encore dans ce contexte. La Banque du Japon s’est encore éloignée de ses pairs mondiaux puisqu’elle a maintenu sa position monétaire ultra-accommodante. Le JPY restera le grand perdant tant que la BoJ ne bougera pas.
- La hausse surprise de la BNS et le potentiel d’intervention sur le marché des changes ajoutent aux pressions haussières sur les taux européens
- La BCE a plein de bonnes intentions et de munitions mais manque de coordination. Les obligations italiennes sont attractives