Date: 6 septembre, 2018 - Blog
Ce n’est pas la première fois que des acronymes apparaissent au pire moment. L’histoire des marchés financiers est remplie d’exemples. Lorsque Jim O’Neill, économiste chez Goldman Sachs, a introduit les BRIC en 2001, il a déclaré que ces pays – Brésil, Russie, Inde et Chine – devraient être les leaders de la croissance mondiale des prochaines décennies. C’était le moment de vendre les actions émergentes. Ensuite, l’acronyme PIGS – Portugal, Italie, Grèce et Espagne – a été utilisé pour identifier les pays européens les plus faibles lors de la crise de 2010 et plus personne ne voulait les détenir. Être surpondéré en obligations périphériques s’est révélé être un bon pari. Et lorsque les cinq fragiles – Afrique du Sud, Turquie, Brésil, Inde et Indonésie – ont été listés par Morgan Stanley en 2013, ils affichaient tous des déficits courants élevés, ce qui les rendait plus dépendants des capitaux étrangers. Mais il s’agissait du bon moment pour acheter les actifs émergents.
Après une année 2017 spectaculaire, 2018 est clairement différente pour les EM. La coexistence d’un USD plus fort et d’une hausse des taux US a entaché la confiance. Cela ne s’est pas amélioré en raison de l’escalade entre les États-Unis et la Chine sur le commerce mondial. En outre, les sanctions contre l’Iran, la Turquie et la Russie ont mis davantage de pression sur le commerce et les relations géopolitiques entre les États-Unis et le reste du monde. L’Afrique du Sud a été le dernier pays à subir les attaques de Trump concernant les réformes agraires à venir. Cela amène les investisseurs à demeurer prudents et à se poser la question de qui sera le prochain. De ce fait, les titres émergents ont chuté. L’expression Fragile Five refait surface, de nombreuses banques ou agences de notation ont rafraîchi la liste de leurs membres. Parmi eux, les plus évidents sont la Turquie et l’Argentine, suivis par la Russie, le Brésil et l’Afrique du Sud.
La Turquie est clairement un cas à part en ce qui concerne la vulnérabilité extérieure, compte tenu de sa position nette d’investissement négative et de son déficit courant. Elle a été pénalisée par les sanctions américaines et par la faible indépendance de sa banque centrale.
En contraste total avec la Turquie, nous avons l’Argentine. Elle a demandé le soutien du FMI, qui a approuvé un programme global de réformes, notamment le renforcement de l’indépendance de la banque centrale, permettant une flexibilité du taux de change et un ajustement budgétaire. Toutefois, l’effondrement du peso s’est accéléré après que le président Macri ait demandé au FMI d’accélérer les paiements dans le cadre de son programme de soutien dans un contexte de détérioration de la confiance . La banque centrale a relevé son taux de référence de 45% à 60% dans une tentative de reconstruction de la crédibilité. Cependant, le peso a continué de s’affaiblir.
La balle est maintenant dans le camp du FMI. Un soutien supplémentaire devrait être apporté plus tôt que prévu, compte tenu du soutien du directeur général du FMI. Le BRL a été mis sous pression à la suite de sondages montrant une avance considérable pour l’ancien président emprisonné Lula. Même si les tribunaux brésiliens ont exclu la possibilité que l’ancien président puisse officiellement se présenter, les investisseurs craignent que l’opinion publique ne l’emporte sur cette décision.
Au Brésil, la principale préoccupation concerne la dette publique, qui a atteint 90% du PIB et un déficit budgétaire de 8,5%. L’absence d’ajustement budgétaire en cas de présidence de Lula pourrait rapidement entraîner des pressions considérables sur le marché brésilien.
L’économie sud-africaine a été touchée par une légère contagion venant de la Turquie, compte tenu de la faiblesse de ses indicateurs externes. De plus, la perspective d’une réforme agraire controversée a suscité des critiques de la part du président Trump, ce qui augmente le risque de futures sanctions américaines, comme celles contre la Turquie. Contrairement à la Turquie, la banque centrale sud-africaine et le ministère des finances semblent indépendants.
La Russie n’a pas de fondamentaux économiques fragiles comparables à ceux des autres pays. Cependant, deux nouvelles séries de sanctions US ont jeté un doute sur les perspectives économiques et le secteur financier russe, pesant sur le RUB.
Lorsque les acronymes (ré)-apparaissent, la dynamique actuelle est proche de son terme
- La Russie est le pays le plus intéressant au sein des EM
- Attendre les signes de stabilisation avant de se repositionner