Date: 26 mars, 2020 - Blog
Le monde plonge dans une crise sanitaire, doublée d’une féroce guerre des prix du pétrole. On craint la récession, voire la déflation. Les marchés digèrent – très – mal ce changement brutal de décor. Les observateurs sont obnubilés par la chute ultra-rapide et sévère des bourses… Serions-nous dans un scénario à la 2008-2009, ou, pire un remake de 1929? Rien. n’est sûr à ce stade, mais le mal est effectivement profond…
Il n’y a pas que les bourse qui comptent!
On s’engage, plus largement, dans une crise de liquidité globale. La vélocité et la transmission de la monnaie collapsent. Il va s’agir de réagir très vite et via des circuits courts. Les banques centrales ne ménagent pas leurs efforts. Elles ont d’abord tenté de répondre aux énormes besoins de liquidité des acteurs financiers (bancaires, institutionnels, et autres spéculateurs très ¨leveragés¨). Il leur a fallu quelques jours pour comprendre que les anciens remèdes (écraser les taux et accélérer l’assouplissement quantitatif) n’y feront rien. La Fed achète donc des papiers commerciaux et des obligations ¨municipales¨. Des discussions sont en cours avec l’administration et le Trésor pour élargir ce périmètre à d’autres actifs: obligations privées dans des secteurs névralgiques ou stratégiques comme le pétrole, la défense, l’aéronautique, voire les actions? C’est un vrai changement de paradigme. L’Etat (au sens large) revient en force, comme acheteur de dernier recours. Quel pied de nez à Trump et à ses acolytes, chantres du démantèlement du ¨Swamp¨. C’est inévitable, car on glisse vers une crise de solvabilité.
L’Europe n’est pas épargnée
Son système bancaire reste le noeud gordien du re-financement des entreprises. Il risque l’implosion, n’en déplaise aux technocrates de la BCE qui ont complaisamment distribué des certificats de bonne santé financière… C. Lagarde n’a pas voulu, su, ou pu dégainer l’arme absolue: la BCE tergiverse à acheter des obligations bancaires. Ce n’est pas dans son cahier des charges. D’ailleurs le nord de l’Europe ¨couine¨ chaque fois qu’une contorsion de la banque centrale est nécessaire pour boucher les trous. Tantôt c’est la cour constitutionnelle allemande, ou ce sont les hollandais, l’Autriche voire les pays scandinaves qui montent aux barricades au nom de l’orthodoxie! Mais le paysage a changé. L’Allemagne est l’un des pays ¨sinistrés¨. Son glorieux secteur automobile et son industrie des machines souffrent indépendamment du cycle économique, à cause de leur retard technologique et de la dé-globalisation. Le modèle économique teuton est malade et son système bancaire exsangue. La coalition gouvernementale de Merkel tangue. Impossible d’échapper aux questions-clé: l’Europe doit-elle émettre des Euro-obligations, accorder sa garantie à son système bancaire? Angela a une dernière chance de ne pas sortir par la – toute – petite porte. Saura-t-elle la saisir ?
Qu’en est-il des court-circuits?
Depuis peu, les marchés du ¨crédit¨ – la dette privée – dévissent. Les sorties de fonds dans les ETFs d’obligations dégradées (high yield) sont massifs. On craint désormais la fermeture de certains d’entre eux. Au demeurant on assiste à la mise à l’épreuve de la gestion passive et de ses produits théoriquement ¨liquides¨ (dont les investissements sous-jacents ne le sont pas). Mais, même la dette de qualité, dite ¨Investment grade¨, subit le même sort. Tous les actifs sont désormais vendus sans discrimination, le cash devient roi. Dans ce contexte, les autorités de tutelle des marchés pourraient instaurer des systèmes de blocage. Faut-il fermer les bourses, réduire les heures de cotations, instaurer des interruptions lorsque l’amplitude des baisses ou le volume dépassent les normes connues (et acceptables)? La théorie capitaliste pure et dure s’y oppose, au nom de la liberté des échanges et des vertus du ¨price discovery¨. Pourtant HongKong avait réussi en son temps à calmer la spéculation en achetant, temporairement, toutes sortes d’actifs financiers et en fermant sporadiquement la bourse. Très novateur, le pays s’essaye aujourd’hui à l’¨helicopter money¨, la distribution d’argent par la banque centrale aux ménages (cf. circuits courts).
L’heure a sonné pour nos grands décideurs d’entrer en matière. Il faut de – toutes – nouvelles mesures pour résoudre la crise avant qu’elle ne dégénère. Vite, et indépendamment du niveau de Wall Street ou du S&P!